(LifeSiteNews) - À peine deux siècles s'étaient-ils écoulés depuis le triomphe de la Croix sur l'idolâtrie romaine, que Satan se remit à crier victoire. Tandis que Eutychianisme a été couronné à Byzance en la personne d'Anastase le Silencieux, Arianisme était omniprésente en Occident. Sur tout l'ancien territoire de l'empire, l'hérésie régnait en maître et, presque partout, elle persécutait l'Église, qui n'avait plus pour fils que les vaincus.
"Ne craignez pas, mais réjouissez-vous", dit l'auteur de l'article. Baronius à ce stade de ses annales, "c'est la Sagesse divine qui se plaît encore à jouer dans le monde. Les pensées des hommes comptent peu devant celle qui tient la lumière dans ses mains, pour la cacher quand il lui plaît et, quand elle le veut, pour la faire renaître. Les ténèbres qui couvrent maintenant la terre marquent l'heure où l'aube va se lever dans le cœur des hommes. FranksLa foi catholique doit y briller dans toute sa gloire". (Baron. Annal. eccl. ad ann. 499, xv ; l'année 496 est maintenant universellement reconnue comme la date du baptême de Clovis.)
Une telle façon d'écrire l'histoire est peu connue de nos jours ; c'est pourtant le point de vue adopté par le premier historien de l'Église, et le plus grand. À l'occasion d'une fête comme celle-ci, nous ne pouvions faire mieux que de répéter sommairement son récit sur les Francs.
Comment ne pas admirer cette providence qui ne fait jamais défaut à l'Église ? Du milieu de tribus encore païennes, au lendemain de l'irrémédiable chute de l'empireDieu se forme un nouveau peuple, il se donne un prince : c'est contre lui que doit se briser la marée montante des hérétiques et des barbares. Telle est, en vérité, la mission divine des rois francs qui s'est manifestée au cours des siècles.
Quelle énergie a la foi pour soutenir les royaumes, et quelle puissance fatale a l'hérésie pour déraciner toute plante qui n'est pas mise en place par notre Père céleste ! Pour preuve, voyez comment les principautés de la Les Goths, Vandales, Heruli, Alani, Suevi, et Gepidi ont complètement disparu, tandis que les Francs voient leur petit coin de terre bien fécondé, et qu'ils empiètent largement sur les territoires environnants. (Ibid. ad ann. 484, cxxxv)
Désormais, la puissance des Francs apparaît lorsque la Croix les précède au combat. Jusqu'alors obscurs et luttant pour leur existence, ils étaient désormais partout victorieux. Il leur suffisait de reconnaître le Christ pour atteindre le plus haut sommet de la gloire, de l'honneur et de la renommée. En parlant ainsi, je ne dis rien d'autre que ce qui est connu du monde entier. S'ils ont été plus favorisés que les autres nations, c'est parce qu'ils étaient suréminents dans la foi et incomparables dans la piété, de sorte qu'ils étaient plus désireux de défendre l'Église que de protéger leurs propres frontières. (Baron. Annal. eccl. ad ann. 514, xxiii)
En outre, ils jouissaient d'un privilège unique et vraiment admirable : jamais le péché des rois n'avait amené ce peuple, comme tant d'autres, à être soumis à un joug étranger. La promesse du psaume (Psaume 88, 31-34) semble avoir été renouvelée en faveur de cette nation : Si ses enfants abandonnent ma loi... et ne gardent pas mes commandements, je châtierai leurs iniquités avec une verge... mais je ne lui retirerai pas ma miséricorde. (Baron. Annal. eccl. ad ann. 514, xxvii)
Honneur donc au saint pontife qui a mérité d'être l'instrument de si célestes bienfaits ! Selon l'expression du saint pape Hormisdas, "Remigius convertit la nation et baptisa Clovis, au milieu de prodiges semblables à ceux de l'âge apostolique". (Hormisd. Epist. 1, ad. Remigium) Les prières de Clotildeet les travaux de Geneviève, les pénitences des moines qui peuplaient les forêts de l'Europe. La Gaule, a sans doute eu une grande part dans une conversion qui a apporté une telle joie aux anges. Si l'espace le permettait, nous pourrions raconter comment elle a été préparée par les grands évêques du cinquième siècle, Germanus d'Auxerre, Lupus de Troyes, Anian d'Orléans, Hilaire d'Arles, Memertus et Avitus de VienneSidonius Apollinaris, et tant d'autres qui, à cette époque de ténèbres, ont porté l'Église à la lumière du jour et ont suscité le respect des barbares.
Remigius, contemporain et survivant de la plupart d'entre eux, et leur rival en termes d'éloquence, de noblesse et de sainteté, semblait les personnifier tous en cette nuit de Noël anticipée par tant de désirs, de prières et de souffrances. Dans le baptistère de l'église Sainte-Marie à ReimsComme auparavant sur les rives du Jourdain, la colombe fut de nouveau aperçue au-dessus des eaux, honorant cette fois non pas le baptême de Jésus, mais celui de la fille aînée de l'Eglise ; elle apporta un cadeau du ciel, la sainte fiole contenant le chrême qui devait oindre les rois français dans les âges futurs pour en faire "le plus digne de tous les rois de la terre". (Matth. Paris. ad ann. 1257: Archiepiscopus Remensis qui regem Francorum cæleste consecrat chrismate (quapropter rex Francorum regum censetur diynissimus) est omnium Franciæ parium primus et excellentissimus)
Deux églises de la ville de Reims revendiquent l'honneur de ces glorieux souvenirs : la grande église Notre-Dame et la vénérable basilique où reposait Rémigius, la fiole de chrême à ses pieds, gardé par les douze pairs qui entouraient son splendide mausolée. Cette église de saint Remigius portait le nom de caput Franciæ, (Mabillon. Annal benedict. xlvii. 30 : Diplôme Gerbergæ reginæ) de toute la France, jusqu'à ces jours d'octobre 1793 où, de sa chaire profanée, fut proclamée la fin des jours de ténèbres, où la sainte ampoule fut brisée et où les reliques de l'Apôtre de la France furent jetées dans une fosse commune (elles furent cependant découvertes par la suite et authentiquement reconnues, et sont, à ce jour, l'objet de la plus grande vénération de la part des pèlerins).
Après un épiscopat de 74 ans, le plus long jamais enregistré dans l'histoire, Remigius s'est envolé vers le ciel le 13 janvier, jour anniversaire de sa consécration épiscopale et de sa naissance. Cependant, au cours du même siècle, le premier octobre a été choisi pour sa fête ; c'est le jour où ses reliques ont été transférées pour la première fois dans un lieu plus honorable, au milieu de miracles tels que ceux qui ont agrémenté sa vie.
La traduction de saint Remigius est le nom que donne encore à ce jour l'église de Reims qui, par un privilège spécial, célèbre le jour de l'octave du Épiphanie la fête principale de son glorieux patron. Nous empruntons les leçons suivantes à l'office de ce jour.
Remigius, également appelé Remedius, naquit à Léon de parents nobles du nom d'Æmilius et de sainte Célinie. Ils étaient très âgés et renommés parmi leur peuple pour leur vertu, lorsque la naissance de cet enfant leur fut prédite par un ermite aveugle du nom de Montanus, qui recouvra ensuite la vue en s'appliquant sur les yeux un peu du lait dont était nourri l'enfant Remigius. Le futur apôtre des Francs consacra sa jeunesse à la prière et à l'étude dans la retraite, mais plus il s'éloignait de la compagnie des hommes, plus sa renommée se répandait dans toute la province.
À la mort de Bennadius, archevêque de Reims, Remigius, qui, bien qu'âgé de 22 ans, avait la maturité d'un vieil homme, fut élu à l'unanimité, ou plutôt installé de force comme archevêque. Il s'efforça d'échapper au fardeau de l'épiscopat, mais fut contraint par l'ordre de Dieu de s'y soumettre. Consacré par les évêques de la province, il gouverna son église avec la sagesse d'un vétéran expérimenté.
Il était éloquent, connaissait les Écritures et était un modèle pour son peuple, accomplissant en actes ce qu'il enseignait en paroles. Il instruisit soigneusement et laborieusement son propre troupeau dans les mystères de la foi et instaura une discipline au sein de son clergé. Il entreprit ensuite d'étendre le royaume du Christ en Belgique et, après avoir converti le peuple à la foi, il fonda plusieurs nouveaux évêchés dont il nomma les pasteurs : à Terouanne, Saint Antimund ou Aumont, à Arras, Saint Vedast, et à Laon, Saint Genebald.
Les œuvres merveilleuses de Remigius, divulguées au loin, remplissent d'étonnement l'esprit de Clovis et de ses Francs encore païens. Lorsque Clovis, qui avait déjà conquis les GauloisIl envoya chercher Remigius et écouta volontiers ses explications sur la doctrine de Christine. Remigius exhorta le roi à embrasser la foi, mais celui-ci répondit qu'il craignait l'opposition de son peuple. Les Francs, informés, s'écrièrent d'une seule voix : "Nous renonçons aux dieux mortels, ô pieux roi, et nous sommes prêts à suivre le Dieu immortel que prêche Remigius."
L'évêque leur imposa alors un jeûne, selon la coutume de l'Église, et après avoir achevé, en présence de la reine sainte Clotilde, l'instruction religieuse du roi, il le baptisa le jour de la Nativité de notre Seigneur, en lui adressant ces paroles : "Baisse la tête avec douceur, ô Sicambrien ; adore ce que tu as brûlé jusqu'à présent, brûle ce que tu as adoré : "Baisse la tête avec douceur, ô Sicambrien ; adore ce que tu as brûlé jusqu'à présent, brûle ce que tu as adoré." Après le baptême, il l'a oint de saint chrême avec le signe de la croix du Christ.
Plus de 3 000 soldats furent baptisés, ainsi qu'Albofleda, la sœur de Clovis, qui mourut peu de temps après ; à cette occasion, Remigius écrivit pour consoler le roi. Lanthilda, l'autre sœur de Clovis, fut récupérée par les Hérésie arienneIl s'agit d'un groupe d'hommes et de femmes qui ont reçu l'onction du chrême sacré et qui se sont réconciliés avec l'Église.
Remigius était extrêmement libéral envers les pauvres et miséricordieux envers les pécheurs. "Dieu ne nous a pas placés ici, disait-il, pour exercer la colère, mais pour prendre soin des hommes. Au cours d'un concile, il frappa un jour, par la puissance divine, un évêque arien de mutisme, jusqu'à ce qu'il demande pardon par des signes, puis il lui rendit la parole par ces mots : "Au nom de notre Seigneur Jésus" : "Au nom de notre Seigneur Jésus-Christ, si tu as la bonne foi à son sujet, parle et confesse la foi de l'Église catholique. L'évêque, retrouvant sa voix, protesta qu'il croyait et mourrait dans cette foi.
Vers la fin de sa vie, Remigius perdit la vue, mais la recouvra peu avant sa mort. Connaissant le jour de son départ, il célébra la messe et fortifia son troupeau avec le Corps sacré du Christ. Puis il fit ses adieux au clergé et au peuple, donnant à chacun le baiser de la paix de Notre Seigneur. Plein de jours et de bonnes œuvres, il quitta cette vie les Ides de janvier de l'an de grâce 533, à l'âge de 96 ans. Il fut enterré dans l'oratoire de Saint-Christophe et, comme pendant sa vie, il fut célèbre pour ses miracles après sa mort.
C'est l'occasion de mettre en avant la belle formule appelée à juste titre la Prière des Francsqui date des premiers âges de la monarchie. (Pitra. Hist. de S. Léger, Introduct. p. xxii, xxiii)
PRIÈRE
Dieu tout-puissant et éternel, qui as établi l'empire des Francs pour qu'il soit, dans le monde entier, l'instrument de ta volonté divine, l'épée et le rempart de ta sainte Église, préviens toujours et en tout lieu, nous t'en supplions, par ta lumière céleste, les fils suppliants des Francs, afin qu'ils voient ce qu'ils doivent faire pour promouvoir ton royaume en ce monde, et que, pour accomplir ce qu'ils ont vu, ils augmentent sans cesse en charité et en valeur.
Saint Léon IX disait à ses contemporains, et nous nous faisons l'écho de ses paroles, à propos de la terre de France :
Faites savoir à votre charité que vous devez célébrer solennellement la fête du bienheureux Remigius ; car s'il n'est pas un apôtre pour les autres, il l'est au moins pour vous. Rendez donc cet honneur à votre apôtre et père, afin de mériter, selon la promesse divine, de vivre longtemps sur la terre, et d'obtenir, par ses prières, la possession de la béatitude éternelle. (Leon. ix. Epist. xvii)
Lorsqu'il parlait ainsi, le souverain pontife venait de consacrer ton église, alors reconstruite pour la troisième fois avec la magnificence qu'exigeait la dévotion croissante du peuple. Les neuf siècles écoulés ont accru tes droits à la gratitude d'une nation à laquelle tu as insufflé une vie si vigoureuse qu'aucune autre ne l'a égalée dans la durée. Accepte nos remerciements, ô toi qui as été comme un nouveau Sylvestre pour un nouveau Constantine.
Gloire à Notre Seigneur, qui a manifesté ses merveilles en toi ! En se souvenant de ces gestes de Dieu accompli sous tous les cieux par ses fils les Francs, l'Église reconnaît (Lect. 1 Noct. in proprio Remensi et aliis) la légitimité de t'appliquer les belles paroles qui annonçaient l'avènement de l'Église. Messias : "Prêtez l'oreille, îles, et écoutez, peuples lointains. Le Seigneur m'a appelé dès le ventre de ma mère... Et il a dit : ... Voici que je t'ai donné d'être la lumière de l'humanité...". Gentilsafin que tu sois mon salut jusqu'aux extrémités de la terre".
C'était vraiment un jour du salutLe jour de Noël, il a plu à Notre-Seigneur de bénir tes travaux et d'exaucer les vœux de ton long épiscopat. Par la sainte foi que tu as enseignée, tu étais alors le l'alliance du peupleLe nouveau peuple composé des conquérants et des conquis dans cette terre de France, qui, une fois elle-même élevéet a rapidement restitué à Dieu le les héritages détruits.
Ô véritable Église, l'unique Épouse, captifs et démunisVoici que Remigius se lève pour dire à tes fils qui sont liés : "Sortez, et à ceux qui sont dans les ténèbres, montrez-vous ! Montrez-vous !" Du nord et du sud, d'au-delà de la mer, voici qu'ils viennent en foule : "Tous ceux-là sont venus à toi. C'est pourquoi louez les cieux et réjouissez-vous sur la terre, car le Seigneur a consolé son peuple" ; après un siècle d'hérésie et de barbarie, Dieu a démontré une fois de plus que "ceux qui l'attendent ne seront pas confondus." (Isaïe 49:23)
Notre confiance en Dieu sera encore récompensée si tu daignes, ô Remigius, présenter à Notre Seigneur la prière des Francs qui sont restés fidèles à honorer ta mémoire. Les renégats vendus à Satan peuvent tyranniser pour un temps la foule trompée ; mais ils ne sont pas la nation. Un jour viendra où le Christ, qui est toujours Roi, dira aux anges de sa garde les paroles de son lieutenant Clovis : "Il me déplaît que ces Goths possèdent la bonne terre de France ; chassez-les, car elle nous appartient." (Greg. Turon. Histor. Franc. ii. 37; Hinemar. Vita S. Remigii, li)
Ce texte est extrait de L'année liturgiqueLa première édition de l'ouvrage de Dom Prosper Guéranger (1841-1875) est en cours de rédaction. LifeSiteNews remercie Les Ecu-Men pour rendre cet ouvrage classique facilement accessible en ligne.